La rénovation d’un bâtiment permet d’améliorer sa performance énergétique. Ceci peut toutefois engendrer énormément de déchets. Dans ce contexte, préserver et recycler sont les maîtres-mots. Regards croisés de trois professionnels sur cette question.
Texte: Philippe Van Lil
Comment envisagez-vous le processus d’une rénovation ?
Stéphanie Cornet, Trait Déco : « Ma première démarche est d’identifier tous les matériaux et objets qu’on peut maintenir ou réutiliser, même si ce n’est pas nécessairement à la même place ou dans la même fonction. Si ce n’est pas possible, je tente de trouver une filière de réemploi pour leur donner une seconde vie. De plus en plus de plateformes à destination des professionnels annoncent les démontages de chantier et répertorient les matériaux à donner ou à revendre. »
François Vliebergh, cabinet d’architectes Auxau : « Nous travaillons sur le principe de la « dictée à trous » : nous complétons ce qui est là. La première démarche est donc de ne pas détruire, mais de préserver et mettre en valeur ce qui peut l’être. Ainsi, par exemple, on récupère de vieux planchers ou on met à nu des structures et murs qu’on peut laisser vivre et représenter ce qu’ils sont. »
Benoît Vanden Breede, Responsible Young Architects : « Notre première étape est de diminuer la consommation énergétique du bâtiment. On effectue une bonne isolation en évitant toutes les pertes par infiltration. Une fois qu’on s’est occupé de l’enveloppe, on réfléchit aux techniques les moins énergivores et à celles recourant aux énergies renouvelables. »
À quels autres éléments prêter attention ?
F. V. : « Il faut anticiper les contraintes réglementaires pour éviter de trop toucher aux structures. À partir du moment où l’on introduit une demande de permis d’urbanisme, on doit respecter des normes. Le fait de récupérer un châssis sans y toucher sous-entend qu’il ne sera pas soumis aux contraintes du permis d’urbanisme. Cela peut par exemple éviter d’avoir à prévoir des systèmes de ventilation non adaptés au bâtiment concerné. »
S. C. : « Dans le cadre de l’aménagement intérieur, j’utilise des matériaux naturels pour le traitement du bois, des châssis, des sols, des meubles, etc., et pour les enduits. Je favorise les produits au packaging propre ou réutilisable. J’essaie aussi de favoriser l’économie locale en faisant appel à des sociétés belges pour des matériaux locaux. Enfin, j’essaie au maximum de mutualiser et centraliser les commandes pour limiter le nombre de kilomètres et éviter de surcharger la circulation, surtout à Bruxelles. »
B. V. B. : « À Bruxelles, afin de préserver le caractère architectural des façades intéressantes, on évite de placer un isolant avec un crépi côté rue. On travaille principalement en isolant par l’intérieur. Il faut faire attention aux problèmes de condensation et travailler avec des matériaux qui régulent l’humidité. Côté intérieur d’îlots, les solutions sont plus vastes : isolants et crépis, isolants et panneaux de finition en fibrociment, bardages en bois ou briques de parement. »
Un dernier conseil ?
B. V. B. : « Il ne faut pas non plus oublier la question du patrimoine et les réglementations publiques. Lorsqu’on isole par l’extérieur la façade à rue, on empiète sur le domaine public. »
F. V. : « Il faut tenter d’être performants mais de façon intelligente, en se concentrant sur les surfaces les plus essentielles. Si vous envisagez la rentabilité énergétique sous la forme d’une courbe de Gauss, au bout d’un moment, l’amélioration de la performance devient plus un exercice de style qu’une réalité financière ou technique. »
S. C. : « Mettre en place un projet le moins polluant possible est juste une question d’organisation. Et le résultat final est tout aussi beau ! Avec les initiatives et filières de mutualisation, les coûts sont réduits par rapport à ce qu’on aurait dû consentir individuellement il y a quelques années. »