Alors que le monde fait face à des défis sanitaires et environnementaux croissants, l’approche One Health – littéralement, « une seule santé » – gagne en pertinence. Elle promeut l’interconnexion entre les santés animale, humaine et environnementale. Le Docteur Eddy Timmermans, Cofondateur de Vétérinaires Sans Frontières (VSF), nous en détaille tout le bien-fondé.

Docteur Eddy Timmermans
Cofondateur de Vétérinaires Sans Frontières (VSF)
La mission de VSF est d’améliorer les conditions de vie et les moyens d’existence des communautés défavorisées qui dépendent de l’élevage. Eddy Timmermans en souligne l’importance : « Il y a environ un milliard de personnes vivant sous le seuil de pauvreté sur terre, dont 60 % pratiquent l’élevage. Le bétail – vaches, poules ou autres – est souvent la principale source de revenus et de nutrition. Assurer la santé de ces animaux est donc un impératif pour la dignité et la survie de ces communautés. »
Des solutions de proximité durables
Majoritairement active en Afrique, VSF intervient dans des pays où l’agriculture occupe jusqu’à 80 % de la population active, contrastant fortement avec les 4 % observés en Europe. Loin de se contenter d’apporter de l’aide ponctuelle, l’organisation déploie des solutions concrètes dans une optique à long terme.
Comme le précise notre interlocuteur, la première étape – cruciale – est « d’appuyer l’installation de services vétérinaires privés locaux qui soient efficaces et accessibles. Déjà formés, ces professionnels reçoivent un soutien pour ouvrir leur cabinet, acquérir un fonds de roulement en médicaments ou un moyen de locomotion comme une moto. »
Cependant, la vaste étendue des territoires d’intervention rend souvent l’action d’un seul vétérinaire insuffisante. C’est là qu’intervient une autre initiative clé de VSF : la formation d’agents communautaires de santé animale. « Sélectionnés et identifiés par les populations locales, ces éleveurs sont formés pour devenir le maillon essentiel entre le vétérinaire et la communauté. Ils participent aux campagnes de vaccination et prodiguent des soins de base. Lorsqu’un problème dépasse leur domaine de compétence, ils font appel aux vétérinaires. » Ce système garantit un service de proximité de qualité, évitant aux éleveurs des trajets longs et coûteux pour accéder aux soins.
Au-delà de l’offre de services, l’association sensibilise les éleveurs à l’importance de la santé animale, des vaccinations et de bonnes pratiques d’hygiène en élevage. L’enjeu est de taille : les maladies animales sont responsables de 20 % des pertes de production.
L’urgence d’une vision intégrée
Toutes ces missions soulignent l’importance cruciale d’une collaboration étroite entre acteurs de la santé animale, santé humaine et de l’environnement, au cœur du concept One Health. « 60 % des maladies infectieuses humaines sont d’origine animale », relève Eddy Timmermans, citant entre autres la grippe aviaire, Ebola ou le SRAS. « Les vétérinaires et les éleveurs jouent un rôle crucial dans l’épidémiosurveillance. Ils agissent comme le premier maillon pour prévenir ces zoonoses, responsables de plus de 2 millions de décès par an dans le monde selon l’OMS. »
Cette approche se traduit concrètement par le renforcement des services vétérinaires de proximité et l’amélioration des moyens d’existence des éleveurs. En effet, la dégradation de l’environnement étant un facteur majeur de l’augmentation des épidémies de maladies infectieuses d’origine zoonotique, VSF accompagne les éleveurs dans l’adoption de pratiques agricoles intégrées, à la fois respectueuses des ressources naturelles et sources de nourriture et de revenus.
Enfin, l’association s’attaque à un autre défi : la résistance aux antimicrobiens. « Nous mettons l’accent sur la prévention par l’hygiène et les vaccinations, suivant l’adage ‘mieux vaut prévenir que guérir’. Le but est de préserver l’efficacité des antibiotiques », conclut-t-il.